SEON - Philips
2 LPs - 6775 007 - (p) 1973
2 LPs - RL 30429 - (p) 1980
2 CDs - SB2K 61789 - (c) 1999

SONATAS - RONDOS - FANTASIES








Carl Philipp Emanuel BACH (1714-1788) March in D Major - from Klavierbüchlein für Anna Magdalena Bach
*
1' 06" A1

Polonaise in G Minor - from Klavierbüchlein für Anna Magdalena Bach *
1' 19" A2

March in G Major - from Klavierbüchlein für Anna Magdalena Bach *
1' 27" A3

Polonaise in G Minor - from Klavierbüchlein für Anna Magdalena Bach *
1' 53" A4

Sonata in E Minor, H. 26 (WQ. 48 No. 3) *
11' 27"

- Poco allegro
4' 43"
A5

- Adagio
3' 57"
A6

- Presto
2' 47"
A7

Sonata in B Minor, H. 36 (WQ. 49 No. 6) **
13' 24"

- Moderato
5' 52"
A8

- Adagio non molto
4' 17"
A9

- Allegro
3' 15"
A10

Rondo (Allegro) in B-flat Major, H. 274 (WQ. 58 No. 3) - 4th collection, Leipzig, 1783
***
4' 52" B1

Rondo (Allegro) in C Minor, H. 268 (WQ. 59 No. 2) - 5th collection, Leipzig, 1785 ***
5' 02" B2

Rondo (Andante un poco) in G Major, H. 281 (WQ. 59 No. 1) - 5th collection, Leipzig, 1785 °

9' 50" B3

Fantasia (Allegretto) in B-flat Major, H. 289 (WQ. 61 No. 3) - 6th collection, Leipzig, 1787 °°

6' 34" C1

Rondo (Andantino) in E-flat Major, H. 288 (WQ. 61 No. 1) - 6th collection, Leipzig, 1787 °

4' 52" C2

Sonata No. 1 in C Major, H. 286 (WQ. 61 No. 2) °°

5' 31"

- Allegro di molto
2' 07"
C3

- Allegretto
2' 06"
C4

- Presto di molto

1' 25"
C5

Rondo (Poco andante e sostenuto) in E Minor, H. 272 (WQ. 66) - "Abschied von meinem Silbermannischen Claviere, in einem Rondo." °°

6' 04" D1

Freie Fantasie (Adagio) für Clavier in F-sharp Minor, H. 300 (WQ. 67) °°

12' 47" D2






 
Gustav Leonhardt
- Harpsichord: Martin Skowroneck, Bremen (Historical construction) *
- Harpsichord: Martin Skowroneck, Bremen, after J.D. Dulcken, Antwerp 1745 **

- Fortepiano: Viennese, Anonymous, c.1785 ***
- Fortepiano: Anton Walter, Vienna, 1787 °

- Clavicorde: Martin Skowroneck, after Haas, Bremen, 1967 °°

 






Luogo e data di registrazione
- Bremen (Germany) - Maggio 1972 (*/***/°°)
- Haus Bortolotti, Amsterdam (Holland) - Maggio 1972 (**/°)


Registrazione: live / studio
studio

Producer / Recording Supervisor
Wolf Erichson


Recording Engineer

Dieter Thomsen


Prima Edizione LP
Seon (Philips) | 6775 007 | 2 LPs - durata 50' 18" & 35' 38" | (p) 1973 | ANA
Seon (RCA Red Seal) | RL 30429 | 2 LPs - durata 50' 18" & 35' 38" | (p) 1980 | ANA


Edizione CD
Sony | SB2K 61789 | 2 CDs - durata 41' 28" & 46' 40" | (c) 1999 | ADD


Original Cover

Der Künstler malt C.P.E. Bach um Beisein von Pastor Sturm - Handzeichnung/Drawing, Kunsthalle, Hamburg


Note
-














Carl Philipp Emanuel Bach, le plus important virtuose de clavier de son époque, s’exprimait ainsi en 1753, dans la première partie de son ouvrage didactique "Essai sur la véritable manière de jouer du Clavier": "On possède ... principalement deux espèces d'instruments, à savoir les clavecins et les clavicordes, qui jusqu‘ici ont obtenu le plus de succès. Les premiers sont généralement utilisés pour les musiques puissantes, les seconds pour jouer tout seul. Les piano-forte [= Hammerflügel] plus récents, quand ils sont de bonne et durable facture, ont maints avantages, à cela près que leur technique doit étre êtudiée à part, et non sans difficulté. Ils font bon effet dans le jeu soliste et dans une musique dont l’effectif n’est pas trop fort; je crois cependant qu’un bon clavicorde, bien que de sonorité plus faible, possede les mêmes beautés et en outre celles qui lui sont propres, à savoir le vibrato et la note tenue, puisque je peux après l’attaque donner à chaque touche une pression supplèmentaire. Le clavicorde est donc l‘instrument par excellence où l'on est à même de juger la valeur précise d'un exécutant. Dix ans plus tard, en 1763, Bach écrivait dans la deuxiéme partie de son traité, au chapitre "De la libre Fantaisie": "Le clavicorde et le piano-forte sont les instruments les plus commodes a notre Fantaisie ... Le registre non assourdi du piano-forte est le plus agréable, et lorsqu'on sait observer la vigilance nécessaire à l'égard de la résonance, le plus charmant véhicule de cet art de la Fantaisie."
La prédilection de C. Ph. E. Bach pour le clavicorcle est compréhensible, car en cette époque de sensibilité les pensées musicales les plus subtiles trouvaient sur cet instrument leur expression parfaite jusqu‘en ses moindres nuances dynamiques. Déjà son père, au dire de Johann Nikolaus Forkel, le premier biographe de Bach, considérait le clavicorcle comme "le meilleur instrument pour l’étude, et en général pour toute pratique rnusicale privée", et il ne pensait pas "que sur aucune sorte de clavecin ou de piano-forte on puisse obtenir pareille diversité dans la coloration clu son". Pour ce qui est du jeu soliste au clavecin, le fils trouve en revanche à plusieurs reprises dans son livre à déplorer les possibilités réduites de coloration, car du fait des jeux généralement disposés latéralement, hors de portée, dans les anciens instruments, il n’était pas possible an musicien de changer de registre en cours d’exécution. C‘est seulement avec les nouveaux instruments du XVIIIe siécle qu'il fut porté remède à ces inconvénients. Au piano-forte peu répandu encore et grevé de mainte déficience mécanique vers 1750, Bach opposa d’abord quelque réserve; mais déjà en 1763, comme nous l’avons vu, il témoignait, sans restriction aucune, des qualités remarquables de cet instrument. C’est en conforrnité avec ces opinions exprimées par le compositeur que Gustav Leonhardt interpréte les œuvres de C. Ph.  Bach, selon les caractéristiques de chacune, sur les trois instruments à clavier sus-nommés. Pour l'interprétation au piano-forte, il utilise un instrument viennois d’origine, qui fut fabriqué par Anton Walter en 1787, un an avant la mort du Maître.
Comme tous les musicians, Carl Philipp Emanuel Bach, le maître du clavier du XVIIIe siècle ainsi que le considéraient tous ses contemporains, le compositeur original par excellence, fit lui aussi des débuts modesteslet discrets. Ses premiers essais de composition, 2 Marches et 2 Polonaises, il les transcrivit de sa propre main, peu après 1730, dans le cahier de musique de sa belle-mère Anna Magdalena. Ce volume de belle présentation avait été offert par Jean Sébastien à sa jeune deuxième épouse et étrenné par deux Partitas. Il laissa le choix et la graphie des compositions subséquentes à ses fils, ainsi qu'à Anna Magdalena. Dans son mélange d'œuvres sérieuses et légères, ce Petit Livre possède le charme du fortuit, du désordre apparent. le caractère propre à l'album familial qui devait connaître par la suite une si grande vogue. Il nous permet d`entrevoir la sphère de la vie privée et familiale des Bach. Le jeune homme de seize ans mit le plus grand soin à soutenir la comparaison avec les autres compositions portées dans le volume. Ses quatre pièces galantes, d'une facture solide. témoignent en maints détails d'une puissante nature créatrice. D'une invention déjà très personnelle, toutes d`élan et de musicalité, ces œuvres d'un débutant figurent de nos jours parmi les classiques préférés de l'enseignement du piano.
Des progrès notables se révèlent dans la troisième Sonate en mi majeur, publiée dans ce premier recueil de six Sonates, que Bach, promu entre temps au rang de "Kammercembalist" (claveciniste de chambre) de Potsdam, dédia à son employeur Frédéric II, et qui de ce fait entrèrent dans l'histoire sous le nom de "Sonates Prussiennes". Se reliant partiellement à la tradition, l'enrichissant d'autre part par l'apport d'un sentiment original, Bach est déjà à la recherche d'une voie personnelle. Le couronnement de la Troisième Sonate, ce mouvement lent dont la dense polyplionie à trois voix semble couler à l'instar d'un fleuve. relève encore immédiatement de la toute-puissante influence paternelle. Dans le premier mouvement par contre, le thème offre, par son caractère mélodique déterminé, un contraste singulier avec le procédé archaïsant des voix échangées tel qu'on le trouve dans les passages suivants; et dans le Presto final, Bach interrompt à quatre reprises par des points d'orgue le rythme de gigue, mettant ainsi resolument en question le déroulement unitaire du mouvement tel que l'exige la musique baroque. Du développement étonnamment rapide de son style pianistique subséqient, nous trouvons ample témoignage dans la Sonate en si mineur, sixième de la publication de 1744 dédiée au duc Carl Eugen de Württemberg. Dans le Moderato richement proportionné qui en forme l'introduction. domine une volonté expressive et un modelé tout dynamique de la phrase et de l'antiphrase musicales. A ce dialogue tout irnprégnè de fantaisie s'enchaîne dans un même climat affectif l'Adagio en si majeur, où prédomine toutefois l'élément mélodique. Un final de bravoure apporte enfin, outre une démonstration technique de traits perlés, une véritable détente.
Après de nombreuses publications de sonates dans les décennies suivantes, Bach fit paraître entre 1779 et 1787 les très importants "Six Recueils de Sonates, Fantaisies Libres et Rondos pour Connaisseurs et Amateurs", un véritable compendium de son art du clavier. Déjà Haydn et Mozart voyaient dans les Rondes un modèle du genre, notamment pour leur richesse inventive et leur art souverain de l'écriture motivo-thematique. Le troisième Rondo en si bémol majeur du 4e Recueil est une pièce d'inspiration jaillissante et enjouée. On n'y rencontre pas seulement d'incroyables surprises dans le déroulment même du morceau, mais encore une conclusion libre de la plus grande fantaisie. Le deuxieme Rondo en ut mineur (5e Recueil) mélange avec pittoresque le sérieux et l'humour. Le premier theme secondaire à caracitère élégiaque s'achève sans transition par des bonds grotesques, qui se répètent par la suite et signalisent le brusque changement de climat affectif. Egalement originales sont les dernières mesures: la basse non accompagnée entonne une fois encore le thème principal, ne parvient pas à dépasser six notes et s‘interrompt à la note de quinle, sur la partie la plus évidemment facile de la mesure.
Le premier Rondo en sol majeur de la même publication est entièrement régi par un thème unique. Comment Bach modifie ce thème conducteur à travers les épisodes accessoires de l'œuvre où il lui fait subir comme un développement de forme sonate, comment il lui imprime toute altération mélodique, rythmique et dynamique concevable, le transportant dans les tonalités et les tessitures les plus éloignées tout en l'enrichissant de plaisantes adjonctions chromatiques; voilà où se révèle pleinement son art souverain d'inventeur de formes.
Un morceau de libre improvisation sur le clavier est présenté dans la Fantaisie I en si bémol majeur (6e recueil), un jeu de contrastes, de modulations audacieuses et de changements de position abrupts, que lie une puissante volonté formelle, imprimant à l'hétérogène la marque de l'unité. Au Rondo I en mi bémol majeur du même recueil sert de base un thème à forme de Lied, qui dans le tempo modéré d'Andantino se développe librement, mais subit dans les mouvements accessoires de surprenantes déviations harmoniques et des effets violents de contraste dynamique. La Sonate I en ré majeur unit trois mouvements de forme concise, et cela au moyen de transitions, en un cycle clos. Au premier mouvement pianistique, tirant ses effets de toute la gamme de contrastes de l'instrument. et néanmoins conséquent dans sa configuration thématique, succède un sensible Allegretto en la mineur. Le tourbillon du Presto di molto termine cette Sonate avec un maximum d'effet.
L'Adieu à mon piano Silbermann en un Rondeau, Bach le composa en 1781 pour son élève D. E. von Grotthus, qui reçut la pièce avec l`instrument favori du Maître. Grotthus en revanche composa un "contre ronde": "Joie de la réception du piano Silbermann". Dans la lettre y jointe, Bach indiquait qu'il voulait donner par cette pièce la preuve "qu'on pouvait aussi faire des Rondos plaintifs". La composition Poco andante en mi mineur se distingue par sa thématique très subtilement variée. Dans le mouvement ombré de mélancolie, ponctué d'audacieuses altérations, l'expression mélodique est notablement soutenue par une succession constante de positions élevées et graves.
La Fantaisie en fa dièse mineur (1787) appartient aux dernières recherches musicales du grand artiste. Elle porte le sous-titre: "Sentiments de C. Ph. E. Bach". Devant cette composition séparée en dix sections, presque toutes oscillant entre Largo (ou Adagio] et Allegretto, avec l'indication de jeu "très tristement et tout à fait lentement", tout essai d'analyse formelle s'interrompt de lui-même. L'imagination créatrice du musicien s'est, dans cette Fantaisie essentiellement individualiste, pliée aux exigences d'un contenu représentatif et émotionnel à caractère extra-musical. Ainsi fondée sur des contrastes imprévisibles, cette musique ne se peut comprendre qu`en tant que représentation d'images verbales, de monologues et dialogues passionnés, où des états d'âme sans lendemain, dont l'intelligence exacte ne nous est plus possible, ont trouvé - graves ou gais - leur expression et leur symbolisation accomplies. C'est cette composition qui pourrait le mieux, en regard des œuvres de jeunesse, montrer la dynamique interne et l'ampleur de champ de la création de C. Ph. E. Bach. Elle forme le couronnement final d'un développement conséquent dans toute sa durée. Au terme de cette œuvre créatrice. se tient déjà, autonome, reflétant idées, sentiments et sensations de l'homme. la musique instrumentale du classicisme.
Lothar Hoffmann-Erbrecht